Où se situe la limite ?
Les écoles doivent être des lieux stimulants pour les élèves, mais quand cette stimulation devient-elle excessive ? Des études relatives à la conception de pub au Royaume-Uni montrent qu’une proportion étonnante des comportements violents ou turbulents peut en réalité être évitée grâce à la mise en œuvre des bonnes stratégies architecturales et de conception intérieure. Il s’avère ainsi que trop de couleurs vives exacerbent ces comportements dans les bars de Grande-Bretagne.
Des conclusions similaires s’appliquent aux écoles. Des études montrent que les écoles peuvent améliorer les résultats des élèves en mettant l’accent sur les conditions visuelles dans les salles de classe. Parmi celles-ci, la complexité de l’aménagement de la salle de classe, les couleurs utilisées dans la décoration, les niveaux d’informations affichées, un sentiment d’ordre (par opposition à la pagaille), le qualité de l’éclairage, etc.
Trop de couleurs vives et des affichages surchargés peuvent facilement stimuler excessivement des enfants. Cependant, une enceinte d’un blanc immaculé dépourvue d’informations sensorielles n’est pas non plus une solution. Les enfants ont besoin de pièces où ils peuvent se concentrer, mais il leur faut aussi des éléments qui attisent leur curiosité et stimulent l’apprentissage.
Des études scientifiques semblent étayer cette thèse. Godwin et Fisher (2014)² ont montré que les enfants placés dans des conditions « où la distraction visuelle est faible » passaient moins de temps à ne pas se concentrer sur leur tâche et obtenaient de meilleurs résultats que les enfants dans des conditions « où la distraction visuelle est importante ». Cette étude a également révélé que les résultats étaient supérieurs dans des salles de classe épurées que dans les salles de cours abondamment décorées.
Toutefois, Read et al (1999)³ ont indiqué que des espaces différenciés dotés de hauteurs de plafond et de couleurs de mur variables favorisaient un comportement coopératif, tout en reconnaissant que cet effet pouvait être contre-productif si la pièce devenait trop complexe. Il semble qu’un équilibre soit nécessaire.
De la modération dans la conception de salle de classe
L’étude Clever Classrooms (2015)¹ s’est penchée sur les effets de la conception des salles de classe sur 3 766 élèves dans 153 salles de classe de différentes écoles au Royaume-Uni. Elle a constaté que le niveau de stimulation dans les salles de classe – compte tenu de la complexité et de la couleur des salles de classe – représentait environ un quart de l’effet global sur les performances attribuable à la conception de la salle de classe. Elle a également montré que si des niveaux de complexité trop élevés ou faibles produisaient de moins bonnes conditions d’apprentissage, un niveau intermédiaire de complexité visuelle était optimal.
Comment dès lors obtenir ce niveau optimal de stimulation ? L’étude Clever Classrooms fournit les recommandations suivantes :
- La diversité visuelle de l’aménagement du sol doit être suffisante pour stimuler l’attention des élèves tout en offrant un certain ordre. La complexité peut générer une stimulation positive tant qu’elle ne provoque pas d’impression de désordre et de pagaille.
- Les affichages visuels sur les murs doivent être bien conçus et organisés. Il est conseillé de conserver 20-50 % de l’espace mural vierge.
- En raison de la perte de luminosité, il faut éviter d’afficher des choses sur les fenêtres.
Les couleurs vives sont-elles à privilégier ?
Quiconque est parent ou a passé du temps avec des enfants sait qu’ils sont indéniablement attirés par les couleurs vives. Dans les salles de classe, les couleurs doivent néanmoins être déployées intelligemment. Jalil et al (2012)⁴ ont examiné la façon dont des couleurs différentes influencent le rendement du travail, induisent certains comportements, créent des perceptions positives ou négatives et influencent l’humeur et les émotions. Leur conclusion : les environnements colorés ont des effets importants sur la capacité d’apprentissage des élèves et leur bien-être.
Dans le cadre de l’étude Clever Classrooms, des couleurs pâles (blanc/pâle) ont été évaluées par rapport à des couleurs vives (rouge/orange). La stimulation provenant de l’utilisation de la couleur s’est également révélée curviligne, c’est-à-dire que les meilleurs résultats sont obtenus quand la luminosité est moyenne.
Tout avec modération
Il semble donc qu’en matière de conception des salles de classe, les éducateurs doivent s’efforcer d’atteindre le juste milieu. Les salles de classe ne doivent bien sûr jamais être insipides et ennuyeuses : les enfants sont là pour explorer et apprendre. Néanmoins, il faut aussi éviter une stimulation excessive. Les salles classe doivent être équilibrées et ordonnées si nous voulons tirer le meilleur de nos enfants. Architectes, chercheurs, éducateurs et chefs d’établissement doivent travailler main dans la main pour concevoir les meilleurs environnements d’apprentissage possible pour l’avenir.
Sources
- Clever Classrooms (2015), Summary report of the HEAD project, University of Salford, Manchester
- Godwin and Fisher: Visual Environment, Attention Allocation, and Learning in Young
Children: When Too Much of a Good Thing May Be Bad. 2014
- Read et al: Impact of Space and Color in the Physical Environment on Preschool Children’s
Cooperative Behavior, Environment and Behavior. 1999
- Jalil et al: Environmental Colour Impact upon Human Behaviour: A Review. 2012.